Marjorie , 3, Quai d'Orléans, 2ème étage porte droite, sur l'île Saint Louis.
Voilà où Deneb avait atterrit en ce jour de février, dans le lit d'une artiste en plus. Enfin le lit… En tout cas artiste c'était prouvé et la flutiste semblait avoir de grande ressources. Ce qui l'avait amené là ? Franchement c'était un peu flou, en revanche le rire étouffé de la demoiselle le guidant vers sa chambre l'était moins. Sa colon souffrait d'une migraine d'après ce qu'il avait comprit, c'est pourquoi ils étaient entré en toute discrétion. C'est surtout pourquoi elle ne s'était pas laissée tomber sur le sofa. Il n'avait pas apprit grand chose de la musique classique cette après-midi, mais il n'avait pas souffert du froid de février. Loin de là.
Marjorie, une demoiselle qui représentait bien son activité. Blonde et douce, elle donnait l'impression d'être aussi légère que son instrument. Menue et mignonne, une tâche de naissance à l'intérieur de la cuisse droite. Une tâche légèrement plus claire. Adorable. Comme beaucoup avant elle la demoiselle avait eu toute l'attention du parisien pendant quelques heures.

Étant passé peut de temps avant à l'hôpital Den' n'avait pas manifesté de signe de fatigue particulier. C'est parce qu'il avait fait le plein de cachets. Certainement. Riagal lui cédait cette lubie, l'effet placebo semblait marcher à merveille sur l'éternel mourant. Évidemment il n'échappait pas pour autant aux contrôles sanguin et test d'effort. Ça semblait ridicule d'ailleurs ces têts d'effort. Comment pouvait-on avoir de mauvais résultat dans un hôpital et être capable de coucher avec une presque inconnue pendant des heures ? Presque. Il connaissait son prénom, Marjorie, et son adresse : 3, Quai d'Orléans, 2ème étage porte droite.
Bref Deneb n'avait pas l'air au bord du gouffre aujourd'hui, juste fatigué comme toujours.

Il déposa ses lèvres sur la nuque de la flutiste et quitta son lit. Ne cherchez pas d'affection dans ce geste, il trouvait simplement son odeur agréable et n'était pas contre l'idée de lui dire au revoir en grand. Oh oui, parce que les revoir n'était jamais exclu temps qu'elles ne cherchaient rien de plus. Il attrapa un tube de gélules et se dirigea vers la cuisine. Il avait effectivement eu le temps de l'apercevoir avant de sombrer dans l'antre de la musicienne. Vous vous faites de fausses idées sur la flutiste, elle n'est pas si fragile que sa douceur le laisse entendre.
Il referma la porte derrière lui.
Cherchant une bouteille d'eau dans la cuisine Deneb ne se rappela la présence d'une colocataire que lorsqu'il entendit une porte s'ouvrir. Il jeta un oeil vers la porte de la chambre de Marjorie.
Évidemment celle ci n'avait pas bougé d'un poil. Bien entendu le parisien était vêtu en tout et pour tout de son éternel médaillon. Cette réflexion ne l'interrompit qu'une seconde dans ses recherches. Ça n'est pas comme s'il n'avait pas vécu de situation plus compliqué. Ayant un sens de la gêne assez peu développé Deneb n'envisageait pas vraiment cette situation comme un problème. Pas comme si la colon était un vampire, c'était une fille qui avait une migraine. Vraiment pas de quoi en faire une maladie.
Rien à voir avec la fois où Liadàn l'avait mordu dans une rue où elle aurait put le vider de son sang. Une expérience bien plus délicate et qui lui avait néanmoins laissé un souvenir étrangement agréable.

" Bonjour"

Il sourit à la jeune femme qui avait fait son apparition dans la pièce de vie. Non il ne semblait pas gêné le moins du monde.

"Deneb"

Ajouta-t-il avant de déboucher la bouteille qu'il avait finit par trouver et d'en boire une longue gorgée. Là il ouvrit la boite de gélule qu'il avait prit en sortant de la chambre et en avala deux ou trois. Heureusement que le cardiologue connaissait le cas Peterson. Le patient ne faisait "attention" qu'à deux paquet de médicaments. Quand il y pensait.

Anke avait passé la soirée chez Constantin. Ils avaient travaillé tard et ne s’étaient pas trop disputés. Les deux artistes avaient du mal à contenir leur passion envers l’autre et la musique étant un terrain trop sensible pour eux deux, ils transformaient donc rapidement les répétitions en avis de tempête. Un des membres du groupe les avait rejoints et ils s’étaient alors calmés puisque Anke ne trahissait en rien qu’elle était d’une nature assez robuste pour défier le chanteur. Aux alentours de cinq heures du matin, elle avait quitté l’hôtel de Clisson et s’était aperçue que la soif avait grandi et que cela n’avait pas du arranger les pics entre les deux amants. Il n’y avait pas grand monde dans les ruelles et elle avait du se rabattre sur un homme au sang des plus médiocres, complètement saoul. Si elle ne ressentait pas les méfaits du vin, elle en avait cet odieux arrière goût et ne doutait pas que le prochain réveil soit douloureux…

Une fois à la maison, elle se glissa dans sa chambre, ferma les rideaux et tourna la clef de sa porte avant de virer ses quelques affaires et de se détendre enfin… Le petit jour arrivait et elle était bien épuisée de toute façon… Lorsqu’elle se réveilla, les rayons du jour ne perçaient plus. Elle se redressa sur son lit et se frotta le front en regrettant vraiment de s’être penché sur cet ivrogne. Au moins il ne recommencerait plus et ne gâcherait le réveil de plus aucun vampire… Elle se dressa pour enfiler un t-shirt un peu long, un shorty de circonstance et sortit de son antre.

Anke glissa jusqu’à la cuisine quant elle perçut l’odeur puis le vit… Un homme là… Elle tourna la tête vers le petit miroir encadré qui juxtaposait sa chambre et apprécia de ne pas s’être démaquillée la veille… Elle n’avait donc pas à faire demi-tour tout de suite, elle était encore couverte. La vampire passa une main sur ses cheveux pour s’arranger avant d’apercevoir dans le reflet de la glace les fesses du jeune homme. Elle se retourna brusquement, le dévisagea sans mot dire comme si elle attendait une explication de ce qui était terriblement évident. Il la salua d’un seul mot et ajouta juste ensuite son prénom comme s’il n’y avait rien d’autre à ajouter et resta d’une décontraction déconcertante.

Anke cilla plusieurs fois avant de le détailler du regard lentement, sans gêne et de retourner en son regard. Elle n’avait pas faim, elle avait encore la gorge dénaturée par la basse cuvée pourtant il aurait été un petit-déjeuner bien juteux. Anke tourna la tête vers la porte de Marjorie et percevait ses respirations régulières et l’odeur du sexe… La vampire se décida à approcher à la hauteur de l’homme.

-Elle t’a dit qu’elle ne vivait pas seule… Elle le dit toujours.

Elle lui mit un coup d’épaule pour qu’il libère la porte du frigo et en sortit un jus de pomme. Cela ne servait à rien, mais ça l’occuperait et lui changerait l’arôme rugueux du palais. Il la regardait, elle leva un sourcil en sa direction avant de prendre place sur une des deux chaises qui accompagnaient la table de la cuisine.

-Tu ne comptes pas enfiler quelque chose ? Mon plan de travail se passerait volontiers de ton cul… Entre nous… je ne sais pas ce que t’en fais…

Elle le scruta de nouveau, sans se soucier de son visage, en portant son verre à ses lèvres comme s’il était finalement une distraction banale mais plus intéressante qu’un poste de télévision.

-Tu vas la revoir ?

La colocataire de Marjorie s'avéra être tout se qu'il y a de plus humaine et bien portante. Sa migraine l'avait visiblement quittée. Fraiche comme une rose la coloc, mais à la beauté tranchant avec celle de la blonde et douce flutiste. La jeune femme manifesta une certaine gêne, on peut même dire qu'elle manifesta un gêne certaine. Nan. C'est faux Den' en rajoute, mais il est vrai qu'elle cilla à plusieurs reprise avant de se rapprocher du parisien.
C'est sans trouble qu'elle parla, peut-être que l'étonnement était passager et non pas témoins d'un trouble de puritaine. Ok clairement pas une puritaine puisqu'elle n'avait pas tourné les talons en rougissant.
Deneb passa une main dans sa nuque comme si ça pouvait lui remettre les idées en place… Comme s'il en avait eu l'intention!

"Oui elle à peut-être évoqué une coloc souffrant de migraine."

Il se dégagea du frigo suite au délicat geste de la demoiselle. Elle saisit une brique de jus de pomme. Il la détaillait depuis qu'elle avait fait son apparition. Après tout elle l'avait fait en le découvrant dans la cuisine ! Il ne présentait d'ailleurs toujours aucune gêne à être nu comme un ver devant une parfaite inconnue. Ce sentiment lui était en effet relativement étranger, c'est surement pourquoi il n'envisagea pas de s'habiller avant qu'elle ne le lui suggère.

"C'est une idée."

Deneb ne bougea pas immédiatement pour autant. Il but une autre longue gorgée d'eau et libéra enfin le plan de travail. Son interlocutrice ne manquerait surement pas le halo de chaleur qu'avaient formés ses fesses sur la surface lisse de sa cuisine, ça lui tira un demi-sourire pour un vague amusement.
Den' cessa de détailler la jeune femme pour plonger son regard trop clair dans celui particulier de la demoiselle. Elle aussi arborait des prunelles trop claires, le genre de regard qu'on à du mal à soutenir trop longtemps. Appréciable, peut-être parce que ces prunelles là étaient plutôt rares. Il se détourna vers la chambre de la flutiste en recommençant à parler. Egal à lui même. Jouant avec sa boite de gélules.

"Pourquoi pas ? Il faut que je lui demande ton prénom pour le connaitre enfin. A moins que tu ne veuilles rester "la fille à la migraine" ?"

Le parisien attrapa son jean et ses clopes abandonnés autour du lit de la demoiselle qui l'avait si bien occupé dans la nuit.
Il l'enfila avant de revenir vers la cuisine, là il alluma une cigarette tout en s'informant : " On peut fumer ici ?"
Il s'assit face à la colocatrice de Marjorie et rangea le flacon de gélules dans la poche de son jean.

"Comment va ta tête?"

L’homme répondait aux questions, docile. Il ne se sentait pas tellement heurté par son comportement, il devait avoir l’habitude de ne pas attirer la sympathie de tous en pareille tenue. Il ne chercha justement pas à trop en faire pour se "rattraper", s’expliquant à haute voix de cette interruption et sembla resituer de lui-même qu’Anke était, elle aussi, maîtresse des lieux. Il la scrutait avec une certaine impertinence mais elle ne s’en offusqua pas, elle avait les yeux braqués sur lui, son corps, sa virilité sans craindre de le déranger, elle pouvait bien lui accorder d'être un peu surpris. Cela l’amusa qu’il n’en fut pas plus inquiet, il était rare que les hommes supportent un regard aussi exigeant…

Il la défia à son tour silencieusement et sans s’en rendre compte, captivé par ses yeux trop translucides mais elle ne s’affola pas : elle avait vérifié, il ne verrait rien. Elle avait mangé quelques heures plus tôt, ses iris ne dévoilaient rien de trop étranges et même si cela était rare, il y avait quelques humaines aux yeux de glace. Après avoir joué avec une petite boite de pilules, il se redressa, décidé à enfiler quelque chose. Il ne s’y était pourtant pas pressé, prouvant qu’il agissait de son propre chef. Elle était chez elle, elle aurait pu vouloir qu’il lui obéisse plus vite mais comme elle avait joué des yeux sur lui, elle trouvait plutôt agréable qu’il ne se dérobe pas trop vite.

Deneb lui répondit avec légèreté et audace et cela lui tira un petit sourire en coin qu’elle noya rapidement dans son jus de fruit sans hémoglobine. Il revint peu de temps après, encore torse nu mais décent cette fois et s’installa en face d’elle, clope au bout des lèvres. Anke avait les bras croisés, passa nerveusement une main dans ses cheveux ébouriffés et sa langue sur ses dents. Elle venait de se lever et il voulait vraiment discuter ? La fumée ne la dérangeait pas et masquerait -un peu- l'odeur de la sueur de chair. Elle ne fumait normalement pas mais à cause du sang de l’ivrogne de la veille, elle eu envie de quelques taffes. Aussi, elle tendit le bras pour attraper le paquet qu’il avait négligé sur la table et l’imita bientôt, sans lui demander la permission, en aspirant profondément avant de recracher un petit nuage de fumée vers le plafond. Elle lança un petit regard vers la fenêtre et le plan de travail, elle devinait encore les traces de son derrière…

Après une longue minute de silence, elle décida enfin à lui accorder son attention. Après tout il n’avait pas fait grand-chose de mal… Il était juste là au mauvais moment et il avait des cigarettes. Il semblait même courtois et tentait de s'intéresser à elle.

-C’est quoi que tu trimballes ? C’est pas trop le trip de Marjo la drogue…

Elle tira de nouveau comme si cela lui avait manqué et poursuivit, un peu plus aimable. Les migraines c’était l’excuse par excellence mais il fallait avouer que pour ce début de soirée, elle s’en approchait réellement.

-Ça va.. J’ai du boire quelques verres de trop.

Elle leva son verre illustrant ses propos et but une nouvelle gorgée.

-Anke.

Il la fixait avec insistance.. Est-ce qu’il tentait de savoir si elle était intéressée ? Est-ce qu’il sentait qu’elle ne l’était pas du tout et cela pouvait l’indisposer ? Non plus. Un petit malin qui voulait un plan à trois sans doute et qui sentait que la brune n’était en rien commode même si elle avait largement prouvé qu’elle n‘avait rien d’une prude. N’avait-elle pas pris plaisir à l’évaluer dans sa tenue d’Adam ?

-En fait je m’en fous… que tu la revois ou non. Faites pas de bruits quand je suis là c’est tout. C’était absurde, elle entendait tout de toute façon. Et donc.. David, que comptes-tu faire de ta soirée ? Elle n’est pas du genre à se lever après… Elle moulina de la main pour expliciter son idée.

Elle ne cherchait pas vraiment à le virer, il pouvait bien partir qu’elle s’en fichait. Elle s’était juste mise à faire… la conversation. Les humains avaient souvent des buts et des objectifs, elle pourrait bien s’en inspirer pour égayer quelques unes de ses soirées.